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Chronique au fil de l’eau : l’arbre que la vigne embrasse et que l’homme enlace

27 août 2021 By Redaction

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Ami des sages, des amours et des dieux, complice de l’aventure humaine et compagnon solidaire de ses frères de sève, l’orme n’a pas fini de nous conter son étonnante histoire, pénétrée de légendes et de mystères.

Planche botanique de l’Ulmus carpinifolia, qui est celui à feuilles de charme. Ulmus… ce nom qui donna « orme » et qui se posa sur la toponymie de lieux où il était planté comme Homps qui jadis était connu pour ses belles allées

Tant son aura est riche de découvertes et sa mémoire de révélations insoupçonnées, il nous fallait donc poursuivre et prolonger notre chronique à propos de cet arbre remarquable qui au début du XIXe siècle, fut avec le frêne, la principale essence bordant le canal du Midi.

L’arbre de la vigne

D’un antique héritage notre orme fut marié à la vigne. Cette tradition trouve ses racines dans le Caucase, voilà plus de 8000 ans, aux origines de la domestication de la Lambrusque, la Vitis Sylvestris. Cette vigne sauvage aux petites baies à la fermentation rapide avait eu la générosité d’offrir un jus aux délices mystérieux qui, sans doute un soir d’un temps préhistoriques, a fait tourner la tête de nos premiers ancêtres agriculteur qui s’employèrent à ce que ce plaisir perdure… des siècles et des siècles! C’est ainsi que les vestiges d’amphores du néolithique, retrouvés sur plusieurs sites, portent la « signature authentique » de la vigne et du vin, révélant des résidus notamment d’acide tartrique. En ces prémices de la viticulture la volonté de dompter cette plante aux impétueuses lianes va alors lier notre orme à l’aventure. Son tronc solide et ses longues branches, le placent en allié des hommes, soutien idéal pour cultiver et récolter le raisin. La langue roumaine conserve la trace de cette pratique puisque l’ormeau se dit jugastru dont l’étymologie latine jugatio signifie lier la vigne à un support, tandis que zuhamu au Pays basque désigne un cep associé à un arbre. On retrouve là la genèse de la pratique « en espallières », décrite au XVIe siècle par la plantation en sillons d’ormes distants de 3 mètres, chacun uni à un cep de vigne. Les arbres, taillés afin que les branches ne montent pas trop haut et qu’elles restent bien horizontales, dessinaient alors ce fameux espalier en enfilade sur lequel il était aisé de lier les sarments.

Poétique mariage

« Vignes en hautain », Gravure du XVIe siècle du Florentin, Antonio Tempesta, Musee de la vigne et du vin au château d’aigle en Suisse

Déjà au premier siècle avant notre ère, Ovide annonce ce serment végétal qui va tant inspirer les poètes. Dans ses Amours il écrit « l’orme aime la vigne, qui n’abandonne pas l’orme ». Il pose là une allégorie du mariage reposant sur cet indéfectible lien de « soutien » qui unit, à l’image de la force de l’arbre à la générosité des fruits. Au XVIe siècle le poète gascon Pèir de Garròs, annonce « je ne taillerai plus les sarments de vigne mariée avec nos ormeaux » et Antoine Bertin, au XVIIIe, s’émeut de voir «… la vigne tortueuse embrasser les ormeaux et ramper autour d’eux ». Orme et vigne ont ainsi scellé longtemps leur destinée puisqu’au XIXe, dans les Pyrénées orientales et dans le Gers, l’arbre est toujours utilisé dans le vignoble, servant aussi à soutenir des treilles. De cet usage restera l’utilisation de piquets en orme, bois si réputé pour être imputrescible et offrir « un fil » bien droit à la découpe. Cette intéressante qualité de résistance à l’humidité fera également de lui, avec l’aulne, le matériau privilégié des charpentes et des moyeux de roues des moulins à eau mais surtout des pilotis portant Venise. Laissons peut-être de côté le fait qu’avec lui furent fabriqués les affûts supportant les canons, sa densité résistant aux chocs des explosions, pour signaler que Marie de Médicis le choisit pour prodiguer l’ombre à ces nouveaux lieux qu’elle avait mis à la mode, les élégants "cours" créés au cœur des cités.

« non solus » solidaire

Et de cet ancestral mariage naquit l’emblème de la solidarité, démontrant la nécessaire complémentarité du soutien d’une modeste force tranquille pour que s’épanouisse la richesse, dans l’abondance et la générosité. Au XVIe siècle, Elzevir, le célèbre imprimeur du Nord d’un « Pays Bas » alors parfois nommé « Belgia », s’empare de l’effigie de l’orme embrassé par la vigne pour en faire son blason. Passionné de la puissance des mots et du verbe, il lui ajoute la devise latine « non solus », « je ne suis pas seul », symbolisant l’union sacrée de ses fils et de sa famille protestante, qui, avec lui, partent se réfugier sur les terres de Hollande, où ensemble ils feront prospérer son imprimerie et ses éditions qui deviendront la célèbre maison « Elsevier ».

La justice et la liberté

L’orme et la vigne et la devise « Non solus », emblème de la solidarité et de l’union familiale chez les imprimeurs-éditeurs Elsevier

Comme nous l’avons déjà signalé, notre orme imposant autour duquel, depuis des lustres, se rassemblent les hommes, s’installe au cœur des villages... qui, peut-être-même, se sont parfois érigés autour de lui. Témoin de l’existence et de l’évolution de cette société humaine, il est le protecteur de la place publique, confirmé dans sa « charge » par le ministre Sully. Sous son ombrage, qui impose le respect, se joue le théâtre de la vie. C’est donc à ses pieds que se rendent les hommages et la justice. Mais les verdicts sont lents à tomber, faisant souvent peu de cas de ces pauvres manants, plaignants ou futurs condamnés, qui risquent bien de se retrouver pendus au bout d’une branche. Ainsi vint l’expression "Attendre sous l'orme" signifiant « attendre quelqu'un qui arrive en retard ou qui ne vient pas ». Avec la Révolution, emporté par un élan patriotique, il va aussi être choisi comme « arbre de la liberté ». Et dès 1790, il sera planté en symbole fort, son vert magnifié par le mouvement des romantiques associant un lyrisme débordant aux idéaux révolutionnaires, opposé au bleu des royalistes.

Refuge des saintes, des ermites et des farfadets

Protection, mystère, magie et sacralité « au creux de mon orme », ici dans le tronc de celui dit « de Sully » à Villesèquelande.

C’est sa compagne « vigne » qui le fit côtoyer les dieux et le nomme l’arbre de Bacchus et de Dionysos, lui montrant le chemin des mystères, des miracles et étrangetés. Et dans l’aura de son tronc qui par les ans écoulés s’évide toujours plus, il devient un refuge. Certes lors de marché l’on vit s’installer en son creux des bonimenteurs et des échoppes de marchands, mais, au fond des campagnes, isolé, il fut surtout choisi par des ermites vagabonds et méditants, quand il n’était pas occupé par des farfadets et autres créatures surnaturelles. Il est dit que ceux-là sortent, la nuit, de ses entrailles pour commettre leur magie, que des sorcières en jaillissent pour leur sabbat et que, lui empruntant une branche en guise de balai, elles s’envolent sous la lune… Investi de tels sortilèges profanes, il sera alors envahi d’objets, d’ex-voto cloué dans son écorce ou suspendus à ses branches. Puis ce tronc n’est-il pas lui aussi idéal pour servir de niche sacrée prête à accueillir une sainte vierge et sa petite chapelle. Il aurait même été le témoin de saintes apparitions, comme à Biran dans le Gers. Édifice cultuel dit « accessoire, on y portait jadis le saint ciboire et les chasses pour des cérémonies votives. Il s’en croise encore dans quelques très rares endroits, parvenus à protéger leur arbre sacré de la fameuse graphiose. Notre-Dame-de–L’Orme par exemple à Castelferrus en Tarn-et-Garonne en porte seulement la mémoire. Chargé de temps d’énergie, l’orme est aujourd’hui enlacé par les bras de ceux qui le vénérèrent encore.

Au bord de notre canal

Comme évoqué lors de la précédente chronique, l’orme fait partie des projets de la campagne de replantation sur les berges du canal du Midi. « Le choix s’est porté sur des ormes champêtres résistants à la graphisose, cette maladie « vasculaire » due à un champignon propagé par un insecte de la famille des scolytes » nous a confié Emilie Collet, responsable du Bureau Environnement & Paysages chez VNF. « Au départ, il était question d’importants alignements et nous avons débutés par 90 ormes à côté de l’écluse de Béteille, près d’Alzonne sur la commune de Montréal. Mais très vite il a fallu se résoudre à se limiter à ce nombre car les experts nous ont vivement déconseillé d’utiliser les essences d’hybrides résistants car fragilisés vis-à-vis d’autres attaques potentielles. Nous les surveillons de près car effectivement, ils sont menacés par les galéruques, ces larves de coléoptères qui leur mangent les feuilles. Ce n’est pas mortel mais cela appauvrit les jeunes plants et, l’été, des arbres sans feuilles, cela ne répond pas du tout à nos objectifs pour restaurer le paysage végétal du canal. »

Véronique Herman

Classé sous :Actualités Balisé avec :arbre, canal du Midi, chronique au fil de l'eau, frêne, orme, vigne

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