Si la ruralité reste attachée aux lieux de mémoire et de recueillement que sont les cimetières, les communes doivent faire face à leur saturation et à la dégradation de sépultures plus ou moins abandonnées à cause de l’éclatement des familles et de l’évolution des pratiques, dont le recours croissant à la crémation et à la dispersion des cendres.
Le Code général des collectivités territoriales fait obligation aux communes d’avoir un cimetière laïc et public, d’en assurer la gestion, l’entretien et l’aménagement. Officier d’état civil, le maire est chargé de la police des funérailles et du cimetière dont il doit faire respecter le règlement municipal, chacun pouvant en prendre connaissance en mairie. Toutefois, si l’entretien des espaces publics du cimetière relève de la compétence du maire, l’entretien des sépultures incombe au premier chef aux familles. Pour être aux normes, un cimetière doit disposer de certains équipements obligatoires tels qu’un terrain commun (carré des indigents), une clôture d’au moins 1,50 mètre de haut, un ossuaire (réceptacle des restes lors des reprises administratives ou de concessions), d’espaces entre les tombes, de plantations et, pour les communes de plus de 2000 habitants, d’un site cinéraire comprenant un espace aménagé pour la dispersion des cendres doté d'un registre ou d’une plaque mentionnant l'identité des défunts et un columbarium.
Tombes abandonnées
Le manque de places conduit maintes municipalités à s’interroger sur les deux seules possibilités qu’elles ont : créer une extension ou reprendre les sépultures abandonnées afin de libérer de la place. Moins onéreuses qu’un agrandissement du site, les procédures administratives de reprises sont très encadrées. Ainsi, la commune a le droit de reprendre une concession si celle-ci est abandonnée ou n’est pas entretenue par l’acquéreur depuis un certain nombre d’années. La commune doit envoyer au préalable plusieurs procès verbaux pour prévenir l’ayant-droit. Trois notes d’information successives sont affichées à la fois au cimetière et à la mairie. Si la famille ne se manifeste pas au cours des trois années suivantes, la concession est alors reprise. La pierre tombale et autres ornements sont retirés et les restes sont recueillis pour être inhumés dans l’ossuaire ou faire l’objet d’une crémation avec dispersion des cendres dans l’espace cinéraire. La commune peut alors revendre la parcelle à un tiers.
Les diverses concessions
La concession n’est pas obligatoire mais elle reste le mode d’inhumation le plus répandu. Une concession est un emplacement (caveau, tombe, case de columbarium) dont on achète l'usage mais pas le terrain. Son acte (concession individuelle, collective ou familiale) précise les bénéficiaires et sa durée : temporaire (entre 5 ans et 15 ans), trentenaire (30 ans), cinquantenaire (50 ans) ou perpétuelle. C’est à l’acquéreur ou aux héritiers de renouveler sa prolongation auprès de la commune qui n’a pas pour obligation de prévenir la famille de la date d’échéance. Il faut donc noter cette date et en informer les héritiers. La commune peut aussi reprendre une concession perpétuelle après constatation d'abandon et avoir respecté un délai d'au moins 30 ans. Cependant, l'entretien par toute personne, même étrangère, a pour effet de faire perdurer cette concession. Enfin, les concessions étant considérées comme « hors commerce », il n’est pas possible de revendre la sienne à un ami ou à un tiers intéressé.
Urnes cinéraires
La loi a supprimé la possibilité de détenir une urne à domicile et le Code général des collectivités territoriales (article L. 2223-18-2) détermine de manière limitative la destination des cendres qu'elles contiennent. Celles-ci peuvent être : soit conservées dans l’urne cinéraire, qui peut être inhumée dans une sépulture ou déposée dans une case de columbarium ou scellée sur un monument funéraire à l’intérieur d’un cimetière ou d’un site cinéraire ; soit dispersées dans un espace aménagé à cet effet (jardin du souvenir) d'un cimetière ou d'un site cinéraire ; soit dispersées en pleine nature (NDR. Bien que cette notion n’ait pas été juridiquement définie), sauf sur les voies publiques. En cas de dispersion des cendres en pleine nature, une déclaration doit être faite à la mairie de la commune du lieu de naissance du défunt (article L. 2223-18-3). L’urne peut également être inhumée dans une propriété particulière. Selon les études CNSAF-CREDOC, plus de 90% des communes ne sont pas aux normes à cause de la méconnaissance qu’ont les élus de la réglementation en la matière. Face au risque administratif, civil, voire pénal quelles encourent, beaucoup d’entre elles envisagent de restructurer leur cimetière en s’appuyant sur l’expertise géographique, administrative et juridique de sociétés spécialisées.
Danièle Storaï
Principaux articles de loi
Code civil (article 16-1-1). Le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort. Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence.
Code pénal (article 225-17) L’atteinte à l’intégrité du cadavre, la violation ou la profanation, par quelque moyen que ce soit, de tombeaux, de sépultures, d’urnes cinéraires ou de monuments édifiés à la mémoire des morts, est punie par la loi de peine d’emprisonnement et d’amende.
Code général des collectivités territoriales (article L.2213-7). Le maire ou, à défaut, le représentant de l'Etat dans le département pourvoit d'urgence à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment sans distinction de culte ni de croyance.
Article L. 2223-2. Les terrains consacrés à l’inhumation des morts doivent être cinq fois plus étendus que l’espace nécessaire pour y déposer le nombre présumé de défunts qui peuvent y être enterrés chaque année.
L’article R. 2223-17 impose « qu'une liste des concessions dont l'état d'abandon a été constaté » soit tenue dans chaque mairie, qu'elle soit déposée au bureau du conservateur du cimetière (s'il en existe un), à la préfecture et à la sous-préfecture. Cette liste est à la disposition du public qui est informé, par une inscription placée à l'entrée du cimetière, des endroits où il peut en prendre connaissance.