Réalisation : Emmanuel Courcol
Durée : 1 H 46
Avec : Kad Merad, David Ayala, Lamine Cissokho
Un acteur dans le besoin accepte d’animer un atelier théâtre en prison. Surpris par les talents de comédien des détenus, il se met en tête de monter avec eux une pièce sur la scène d’un vrai théâtre. Même si cette démarche évoque des expériences de restitution de spectacles conçus en France avec des détenus à l’extérieur de leur prison, le réalisateur s’est inspiré d’un projet de l’acteur et metteur en scène suédois Jan Jönson. En 1985, ce dernier monte avec les détenus de la prison de de Kumla, En attendant Godot, de Samuel Beckett. C’est de cette expérience qu’est tiré Un triomphe. Le titre est ironique mais gardons le suspense. Pour réussir ce pari, le scénario prend quelques libertés avec le réel. Car la manière dont la foi d’Étienne (Excellent Kad Merad) le metteur en scène de la pièce parvient à déplacer des montagnes tient du miracle. Le film surprend par son rythme trépidant, son refus de psychologie facile et son parti pris de nous montrer la prison uniquement quand la future pièce est en répétition, sans s'attarder sur la vie à l'intérieur de l'établissement pénal. Nous voilà avec une bande de prisonniers qui vont se transformer en acteurs. Au départ c’est juste pour passer le temps et ne pas être enfermés entre quatre murs, mais au fur et à mesure cela va devenir autre chose. Il va y avoir un véritable échange entre eux et ce prof de théâtre. Chacun va dépasser ses préjugés. Au fur et à mesure les craintes vont s’envoler. Nous n’avons plus à faire à des tolars mais des comédiens. En sommes, c’est une belle leçon de vie. On se met à rêver que même une personne condamnée pour grand banditisme peut trouver sa voie. Bien sur, et c’est dans l’air du temps, certains pourront critiquer l’humanisation de criminels, les faisant passer pour des innocents. D’ailleurs, on ne connaît quasiment rien de leurs méfaits. En tout cas, grâce à eux, nous allons rire à cœur joie car ce n’est pas triste. En outre, cette œuvre constitue un joli plaidoyer pour l’amélioration des conditions de détention et l’accès au plus grand nombre à la culture. Cela n’a l’air de rien, mais cette vision tranche avec l’approche exclusivement répressive qui domine le débat public sur la prison et les tentatives croissantes d’observer la culture d’un point de vue uniquement marchand.
Jean Segonne