La Semaine du Minervois

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Chronique au fil de l’eau : une odeur de sainteté éternelle

12 novembre 2021 By Redaction

Dans sa solide verticalité, des profondeurs de la terre au firmament des cieux, le cyprès a traversé l’espace et le temps. Depuis des millénaires, de sa voix sage et paisible, il parle aux dieux et aux hommes. Sobre sentinelle dressée sur nos chemins ou compagnon entêtant du labyrinthe de nos vies, c’est de ses fragrances d’encens que se parfume la camarde. Arbre de vie, arbre de mort, le cyprès reste là, immuable, à nous rappeler l’éphémère tout en portant au ciel nos rêves d’éternité.

Une barque de patron au passage de l’échelle d’écluse de Fonséranes avec l’imposant alignement de Cyprès… en rive gauche !!! Contrairement à l’erreur faite la semaine dernière. Car suivant le cours de l’eau, sur le canal du Midi, de Toulouse au seuil de Naurouze, partage des eaux, la rive droite est à gauche, et de Naurouze à l’étang de Thau, la rive droite est… à droite !

Lors de notre précédente chronique, vous avez pu lire que le cyprès représente encore aujourd’hui un peu plus de 2% du linéaire arboré du canal du Midi. Et même si il s’élance rarement juste au bord de l’eau, planté généralement sur le côté extérieur du chemin de halage ou près d’un ouvrage d’art qu’il désigne, son système racinaire pivotant stabilise les terres. Il ne semble pourtant pas faire partie des campagnes de replantation entreprisent par les Voies Navigables de France.

Les défauts de ses qualités

Avec cet ancrage très puissant, capable de résister au vent et aux affaissements du sol, le cyprès est donc très efficace contre l’érosion des francs bords. En effet sa racine principale s'enfonce profondément à la verticale dans le sol et s’entoure de racines secondaires, se développant latéralement autour d’elle. Cette qualité doublée de celle des alignements denses, paravents des plus efficaces, fait de cet arbre un réel atout pour la voie d’eau. Mais on peut facilement imaginer qu’avec son port parfaitement droit et la compacité de sa ramure, constituer avec lui de longues rangées, de part et d’autre du canal, le transformerait en un interminable couloir « fermé », bouchant toute vue sur les paysages traversés et où l’ombre portée serait très limitée au soleil le plus chaud. Notre canal du Midi deviendrait alors tel l’unique voie d’une sorte de labyrinthe d’eau, dédale insignifiant aux méandres monotones et sévères.

Roi du labyrinthe

À Marseillette, les cyprès sont encore très nombreux en alignement serré, protégeant la navigation du vent. En rive gauche les cyprès et en rive droite les peupliers.

Lui qui dresse déjà les pointes de ses exclamations au jardin des arts de la Renaissance italienne, c’est au XVII siècle qu’il se taille la part belle dans les jardins de France et d’Europe. Il va en effet s’imposer en maître des chemins cachés et des jeux de cache-cache, réel complice des secrets ébats des fêtes galantes. Les tout premiers du genre apparaissent au XVe siècle avec Charles V aux jardins de Saint Paul à Paris et ils feront la passion de Charles Quint qui en aménagera dans chacun de ses châteaux. Avec Madame de Sévigné en Bretagne, Buffon au jardin des Plantes et Le Nôtre pour Chantilly et à Versailles, le labyrinthe de cyprès prend sa place dans « le jardin à la française » du XVIIe. Docile, l’arbre participe à cette « domination » de la main de l’homme sur la nature. Ces aménagements suscitent alors un réel engouement dans toute l’Europe. Il trace ainsi son chemin de Naples à Paris en passant par Madrid. Et il va même jusqu’à Londres, où pourtant l’esprit « nature » domine. Il y est en effet question de « Cypress garden ».

Prince des jardins sculptés

Planche de croquis d’exemple de taille pour les topiaires par André Le Nôtre, célèbre jardinier royal qui développa ce style à Versailles.

C’est dans ce même courant de l’art des jardins que se découvre celui des « topiaires » (étymologie : ars topiaria signifiant art et paysage ) déjà pratiqué dans l’Antiquité et qui va suivre la même voie, passant par la Renaissance italienne pour s’épanouir au XVIIe. Le cyprès, aux côtés du buis et de l’if, se prête merveilleusement à la main de l’homme, épousant toutes les formes et les volumes les plus audacieuses et parfois étonnantes. Les jardiniers « royaux », de Jacques Boyceau puis Claude Mollet pour Henri IV et Louis XIII suivis de Le Nôtre sous Louis XIV le magnifieront. Les deux derniers cités vont alors imaginer les parterres à compartiments et les « broderies » végétales sur un plan horizontal.

Un sacré bois précieux

Ancienne planche botanique du cyprès avec son fruit

Réputé imputrescible, résistant aux épreuves du temps et des tourmentes, le noble bois du cyprès servit aux sarcophages égyptien, cercueils sacrés des pharaons. Ceux-ci inspirèrent bien des sépultures dont celles de plusieurs papes. Si chez les Grecs et les Romains, le cyprès ornait les nécropoles, la légende dit encore qu’Hiram l’architecte choisit son bois pour construire le plancher du temple de Salomon et que ce même bois, avec l’olivier et le cèdre, est celui de la sainte Croix du Christ, mais aussi du sceptre de Jupiter et de la flèche de Cupidon. Une éternelle vie entre Eros et Thanatos que notre arbre confirme bien avec son « feuillage » persistant et son véritable nom latin de Cupressus sempervirens, cyprès « toujours vert ». Ce qui n’est pas sans rappeler les cris lancés lors des sacres et couronnements de rois : « Vivat vivat semper vivat », « qu’il vive, qu’il vive, qu’il vive éternellement ». Au XVe siècle cette acclamation accompagnait encore le cortège funèbre des rois de France.

Parfums d’éternité

Quant à ses effluves aux parfums d’encens, elles lui ont octroyés aussi cette importante part d’aura dans le « sacré ». Cet encens de cyprès était censé permettre de communiquer avec les régions souterraines et le reliait au culte d'Hadès, dieu des Enfers. Mais, si il n’est pas le fameux « boswellia sacra », véritable arbre à encens, le cyprès sécrète bien une résine odorante qui depuis l’Antiquité, fut reconnue par les Grecques comme un encens de prière favorisant le passage vers les mondes supérieurs et à l'élévation spirituelle. C’est peut-être cette vertu qui le désigna en phytothérapie comme remède efficace pour calmer les migraines et les maux de tête… Son fruit, qui est une noix, est également au service de la pharmacopée végétale qui le préconise dans bien des cas, au profit de la bonne santé. N’oublions pas aussi que pour nos chères abeilles le cyprès est un compagnon de vie bien utile. Son pollen, tant craint par beaucoup d’entre nous pour les allergies, représente une aubaine printanière pour la ruche où s’élève le nouveau couvain tandis que sa résine offre, au cœur de l’hiver, un exsudat qui servira à nos filles de l’air à fabriquer de la propolis.

Funeste cyprès… quel injustice ! Notre arbre est bien symbole de vie… immortelle ? On peut rêver !

Véronique Herman

Classé sous :Actualités Balisé avec :arbre, canal du Midi, chronique au fil de l'eau, cyprès, plantations, VNF

Chronique au fil de l’eau : au vent silencieux des piliers des âmes défuntes

5 novembre 2021 By Redaction

Né de l’amour d’Apollon, c’est de sa musique mélancolique et grave qu’il rythme les paysages et charme Téthys, la Méditerranéenne, tandis que sa longue silhouette, symbole d’immortalité, s’élève au firmament des dieux, paisible gardienne de nos chers disparus. Sentinelle du vent, il désigne les lieux et les protège. Ainsi il est venu, lui aussi, se mirer dans les eaux du canal du Midi.

Solides et tortueux vieux cyprès, unis serrés les uns contre les autres, en alignements ils ne font plus qu’un, rempart immuable contre le vent. (ici le long du canal à Marseillette ©V.Herman)

Vous l’aurez compris, il s’agit là de l’élégant cyprès, arbre mythique et évocateur de nos plaines et nos garrigues. Solitaire, il vient fièrement les ponctuer de son flambeau et, en file indienne, c’est de son pinceau d’émeraude qu’il en trace, quadrille et souligne les formes. À la veille de novembre, mois si emblématique de la mémoire et des hommages à nos défunts, ce sujet consacré à celui qui contribue à la beauté mélancolique et sereine de nos cimetières s’est donc tout naturellement imposé.

Timides implantations

Alors qu’elle portait encore le nom de Canal Royal du Languedoc, l’œuvre magistrale de Pierre-Paul Riquet ne semble avoir été garnie que d’un seul cyprès ! En effet, les archives des Voies navigables de France signalent que « le tout premier cyprès répertorié figure dans l’état des plantations de 1780 de la division de Trèbes »… unique et le seul de cette essence qui attendra la Révolution passée pour timidement se multiplier au bord de celui alors nommé « canal du Midi ». C’est en réalité en 1817 que l’on peut attester d’une vraie présence de cette essence, figurant alors au nombre de 144 sur le tableau des plantations de la division de Carcassonne. En 1853, dans « le guide du voyageur », le Comte G. de Caraman écrit : ....«Sur plusieurs points, le canal est bordé par une plantation de cyprès formant une haie vive très serrée, et qui préserve les barques de l’action des vents du nord, lesquels règnent quelquefois avec une violence qu’on a de la peine à combattre». Et en 1859, la population va alors quasiment doubler, avec 268 sujets âgés de 15 à 36 ans et répartis entre la retenue du Roc, celle de Beteille et le bassin de Castelnaudary.

Des barquiers pour… des barquiers contre !

Comme au Somail, signifiant de loin la présence du pont, de la chapelle et de la dînée, le cyprès a servi à désigner les lieux et les ouvrages importants sur le canal (©V.Herman)

Dès ses débuts le cyprès est assigné à plusieurs tâches destinées à faciliter la navigation. En solitaire, il vient désigner un ouvrage, que ce soit une écluse, un pont, une étape comme par exemple une dînée. Le haut de sa silhouette pointée vers le ciel permet alors aux barquiers de repérer les lieux de loin et de pouvoir appréhender la manœuvre à exécuter. Alignés, serrés et unis les uns contre les autres, ils sont là pour protéger de toute la force tranquille de leur stature dense et puissante. Et comme en Provence ils défendent les cultures du Mistral, ils sont venus ici préserver les bateaux des assauts du vent du Nord. Cers et Tramontane ont beau s’acharner dans leur épaisse ramure, ils ne font plus qu’un, rempart impassible et immobile. Seuls, parfois, quelques rares branchent étourdies ne résistent pas et sortent définitivement de l’épais fuseau. À nouveau, les archives VNF soulignent l’utilité du cyprès au bord du canal, les longs alignements se voyant particulièrement confirmés au XXe siècle : « en 1945, les chefs d’Arrondissements préconisent de planter des cyprès … à 1m d’inter-distance, sur 100m ou d’avantage, aux abords des écluses, aux courbes, et en général aux passages délicats, de manière à protéger contre le vent les bateaux accédant à celles-ci dans les secteurs les plus ventés. » Et pourtant… malgré l’évidence de cet intérêt protecteur, un certain nombre de barquiers vont « rouméguer ». Ils estiment, au contraire, que lorsqu’ils sont sur la descente, qu’ils repartent de Toulouse vers Sète, le bénéfice du vent leur permet, surtout chargés de fret lourd tel le sable, de gagner en temps et en carburant. Et c’est tout particulièrement le cas, sur la « ligne » droite du grand bief. Sur les 54 km, depuis l’écluse d’Argens et jusqu’à l’escalier de Neptune, à Fonsérannes, ils peuvent se laisser filer au vent et arriver plus vite aux portes de Béziers. Qu’à cela ne tienne, les plantations continueront certes de façon modérées et ciblées. Aujourd’hui, outre les nouvelles campagnes de replantation, le cyprès est considéré comme la deuxième essence des alignements, après le « malheureux roi » platane. Avec plus de 1000 individus et un linéaire de 8 km cumulé, il représente un peu plus de 2 % du patrimoine historique végétal du canal.

Un arbre, né des amours d’Apollon

A Fonsérannes, sur la rive droite de l’Escalier de Neptune, une belle allée de cyprès a été plantée à la fin du XIXe siècle pour protéger du vent et faciliter les manœuvres des barquiers qui franchissaient les écluses.

Si depuis des millénaires, l’homme en a fait l’arbre des paysages méditerranéens, la patrie originelle du cyprès se situe en Asie occidentale où il aurait planté ses premières racines sur les flancs des montagnes au nord de l’Iran. Et le poète, séduit par l’aura de cette élégance si grave, s’est emparé du port élancé vers les cieux de notre arbre. Ainsi Ovide dans ses Métamorphoses l’a fait naître de la décision d’Apollon qui, en lui, immortalisa la mémoire de son cher Cyparissus tant aimé. L’histoire raconte que ce dernier tua malencontreusement de son javelot le magnifique cerf dont il s’était fait l’ami fidèle. De désespoir Cyparissus voulut mourir et implora les dieux que son deuil soit éternel. Il pleura tant que son sang s’écoula en flots de larmes et que ses bras et ses jambes s’assombrirent d’un vert profond. Et c’est ainsi que lentement il se transforma en cyprès. Dans sa tristesse, Apollon déchiré par la perte de celui qu’il aimait, lui dit « Je verserai sur toi des larmes et tu en verseras sur les autres compagnons de la douleur ». Et de Cyparissus, le cyprès « arbre funéraire » était né.

Nous vous donnons rendez-vous la semaine prochaine pour retrouver notre cyprès au fil de l’eau, des dieux et des hommes.

Véronique Herman

Classé sous :Actualités Balisé avec :arbres, barquiers, canal, canal du Midi, chronique au fil de l'eau, cyprès

La Une de notre édition du 4 novembre 2021

4 novembre 2021 By Redaction

Classé sous :La Une de cette semaine Balisé avec :cyprès, emploi, formation, gestion des déchets, journées scientifiques, orientation, préhistoire

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