Jeudi 8 avril, viendra en discussion devant l’Assemblée la proposition de loi sur la protection patrimoniale des langues régionales, dont le rapporteur est le député breton Paul Molac.
Dans les articles proposés par la loi, des mesures incitatives pour l’enseignement des langues régionales, ou le droit d’utiliser le ~ dans les prénoms bretons ou des voyelles (autres que le e) accentuées en occitan ou catalan,… Les associations occitanes audoises ont lancé un appel aux députés du département à voter positivement à ce texte dans la version qui a été retenue par le Sénat. En effet, lors de la première lecture (13 février 2020), le ministre de l’Éducation s’était évertué à faire retirer tous les articles qui lui auraient fait prendre des mesures positives pour cet enseignement. Il faut dire que ses réformes du lycée et du baccalauréat ont entraîné un recul significatif des participants aux cours de langues régionales (le plus souvent en l’absence de l’organisation de ces cours), le tout couronné par un coefficient minimaliste pour l’obtention du bac. Le 13 mars, des milliers de Bretons ont manifesté à Kemper car le ministre n’a pas de temps à consacrer à la rédaction de la nouvelle Convention État-Région pour l’enseignement du breton et du gallo, alors que tout a été calé entre les élus régionaux et les rectorats. Dans notre région, la Convention promise en 2017 vient d’être signée, mais les moyens en formation et postes ? Les sénateurs ont réintroduit les articles retirés. Il revient aux députés soit de voter le texte tel quel signifiant ainsi et enfin une avancés dans le rapport de la France à ses langues, ou de revenir à la version édulcorée qui rendrait le texte purement décoratif , tout comme l’article 75-1 de la Constitution « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » qui n’oblige l’État à aucun devoir et n’ouvre à aucun droit pour les citoyens.
Pour que vivent nos langues
Pour faire avancer ce dossier, a été créé, en 2019, le collectif "Pour que vivent nos langues", qui regroupe les principales associations liées à la promotion des langues régionales (une quarantaine en tout : IEO, federacion Calandreta, FELCO, Congrès Permanent de la Lenga Occitana, Felibrige, Forum d’Òc, Òc-Bi, AELOC pour l’ensemble occitan) qui a organisé un rassemblement à Paris le 30 novembre 2019 et une série de manifestations le samedi 10 octobre dernier dans les départements concernés pour interpeller les populations et les pouvoirs publics. Dans une lettre adressée au président de la République, le 18 juin 2020, le collectif écrivait « L’avenir de la diversité linguistique et culturelle qui existe encore en France ne relève pas seulement d’une approche éducative, même si l’Éducation doit jouer un rôle central dans la transmission des langues et cultures de notre pays. C’est tout un projet pour l’avenir de la France qui est ici en jeu », ajoutait : « Nous ne voulons pas que l’école favorise une poignée de spécialistes, nous voulons un accès facilité pour tous les jeunes à la langue de leur territoire. » et concluait : « L’avenir de sa diversité culturelle et linguistique constitue un enjeu majeur pour la société française ».
Baragouin ?
En toile de fond, nous avons le terme de baragouin (comme dit la Semeuse : Langage incompréhensible par suite d'une mauvaise prononciation, d'un vocabulaire impropre, d'une syntaxe incorrecte. Terme venant du breton bara-le pain et gwin-le vin), utilisé en ce début mars par le Garde des Sceaux à une réponse au député breton Marc le Fur posant une nouvelle fois la question de la non-ratification par la France de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Que le ministre ait présenté des excuses ne change rien à l’état d’esprit dont il a fait montre.
Enjeu territorial
Par contre, il est significatif que les treize présidentes et présidents des régions de France (droite, gauche, autonomiste) aient signé un appel commun, montant des territoires, adressé aux députés pour leur demander le vote en l’état de la proposition Molac : « Notre responsabilité, en tant que présidents de Région et de Collectivité, est de pouvoir garantir et promouvoir la vitalité culturelle et patrimoniale de nos territoires. Cette proposition va dans le bon sens, afin que vivent nos langues, que l’UNESCO classe pour une grande majorité d’entre elles en grand danger d’extinction. C’est en ce sens que la rédaction de la proposition de loi dite « Molac » tel qu’issue des travaux du Sénat va dans le bon sens, et que nous appelons de nos vœux une adoption conforme par les députés de tous les bancs afin que ce texte puisse entrer en vigueur ».
Puisse cet appel être entendu…
Et après ?
Texte voté ou pas, son application ou la poursuite de pressions demanderont l’engagement de toutes celles et tous ceux qui sont attachés à une expression linguistique et culturelle ouvertes et plurielles prenant en compte toutes nos richesses et connaissances qui ne sont pas seulement patrimoniales mais aussi actuelles et facteurs pour une société d’échanges et de rencontres : l’arcolan contra lo gris/la diversité contre l’unicité. Anem òc, per l’occitan e per las lengas de França !
Les associations occitanes régionales appellent les citoyens à envoyer à nos députés, un petit mot par courrier, mail et autre réseau social pour les inciter à un tel vote (exemples de courrier sur http://occitan-aude.over-blog.com)
Collectif Pour que vivent nos langues : www.pourqueviventnoslangues.com
Alan Roch