La Semaine du Minervois

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Chronique au fil de l’eau : nature amie, nature ennemie du « grand œuvre » d’un génie

12 mai 2021 By Redaction

Herbes folles, herbes tendres ou herbes « d’eau », terres, sables et pierres toutes s’inscrivent dans le cours de l’histoire de la royale voie d’eau depuis sa géniale création par Riquet jusqu’à sa sauvegarde actuelle. Complices ou rivales, de tout temps elles ont joué leur rôle et marqué tant l’ouvrage que le paysage.

Vaste sujet que ces éléments naturels que notre Pierre Paul Riquet dut maîtriser pour réaliser son canal des deux mers, dont ses dignes héritiers et leurs suivants s’inquiétèrent et qu’ils exploitèrent, puis qui, aujourd’hui encore, demeurent l’objet de toutes les préoccupations des Voies Navigables de France. Ils seront donc déclinés dans les thèmes présents et à venir de nos différentes chroniques.

Cette parfaite horizontalité

À la découverte de la voie d’eau au XVIIe siècle, ce qui étonna particulièrement ce fut ce fameux linaire de miroir d’eau à la parfaite horizontalité déroulée entre chacune des écluses. En effet, à l’époque, il était question de navigation en mer d’une part ou alors en rivière, sur des eaux irrégulières et souvent imprévisibles, dans des lits aux reliefs accidentés. Michel Adgé, historien de référence du « Canal de Languedoc », se plaît à le souligner en rappelant les paroles de Louis de Froidour, ami et grand soutien de Pierre-Paul Riquet lors de sa fabuleuse entreprise : «Il est plat, et n’a aucune pente, afin qu’il y ait de l’eau également partout, et qu’il soit aussi facile à la montée qu’à la descente ». Ces paroles résument en effet assez bien la démarche de Riquet de tracer son canal suivant les courbes de niveaux, évitant dès lors tout remblayage ou de trop profondes tranchées.

Comme une rivière paisible qui serpente

A l’horizon de Paraza, aux confins du Pays Corbière-Minervois et de la porte d’entrée du Grand Narbonne, se dessine le méandre harmonieux d’une « lyre » à flanc de coteaux du terroir du château de Ventenac. Au sommet de sa courbe se trouve le fameux pont-canal du Répudre, soulignant de son imposante monumentalité le symptomatique respect des courbes de niveau du relief par Riquet attentif à conserver cette même altitude de 31,35 mètres.

Prouesse de son créateur, le canal se maintient durant 54 kilomètres à la même altitude. Riquet est en effet parvenu à le conserver sur cette longueur étonnante, entre l’écluse d’Argens et celles de Fonsérannes, à 31,35 mètres au-dessus du niveau de la mer. Il semble ainsi flâner librement dans le Minervois pour atteindre les terres biterroises et le Saint-Chinian. Tranquille, il musarde sur ce grand bief jadis nommé « Grande Retenue », en surplomb de la plaine, paraissant tracer autant de méandres naturels entre vignes et villages au détour de quelques châteaux et « Folies vigneronnes », témoins de la gloire du Languedoc viticole. Aux horizons de Paraza, la « lyre » qu’il dessine aux pieds des coteaux du terroir de Ventenac, et dont le fameux pont-canal du Répudre se trouve au sommet de sa courbe, est le plus exemple symptomatique du respect du relief pour conserver cette même altitude.

Revers de la tranquillité

Le calme des eaux de la Grande Retenue a été et est toujours très apprécié de tous les usagers. Jadis, il l’était plus particulièrement par les patrons de barques qui de ce fait ne perdaient pas de temps aux écluses, et prenaient également moins de risques. La barque poste dans son élégante ligne fusiforme pouvait même y « glisser » à plus de 10km/h, entraînée par le halage de ses chevaux au grand trot. Pourtant, dès le XVIIIe, se sont manifestés les revers de ces avantages. Ainsi en 1804, l’arrière-petit-fils de François Andréossy, l’ingénieur bras droit de Pierre Paul Riquet, explique dans son Histoire du Canal Du Midi, que ses longs biefs facilitaient la prolifération des végétaux dont les espèces aquatiques. « … les herbes qui croissent dans le fond de la grande retenue, s’élèvent jusqu’à la surface des eaux, et ralentissent le mouvement des barques chargées, ce qui fait que les patrons sont obligés d’augmenter le nombre de chevaux… » Il souligne que ce n’est point le cas dans les portions plus petites, où le fond est à 2,50 mètres et « où un mouvement sensible renouvelle les eaux », prenant en exemple les petites retenues sous le partage des eaux.

Faucher dans l’eau verte du canal

Éradiquer les végétaux aquatiques proliférant dans le canal est depuis longtemps une préoccupation. Cette machine créée au XVIIIe siècle devait faucher le fond du lit du canal pour que les bateaux ne soient plus freinés par leur présence et les barquiers obligés d’atteler des chevaux supplémentaires pour ne pas perdre de temps

La grande difficulté de vidanger et de mettre à sec un aussi grand bief a été et reste toujours une difficulté. Curer et arracher ces herbes fut et demeure pourtant nécessaire. Cette problématique incita donc très tôt les esprits créatifs à trouver des solutions. En 1766, un dénommé Clausade imagina une machine opérant depuis une barque pontée et coupant les plantes au fond de l’eau. Il s’agissait de plusieurs faux actionnées par un savant système alternatif, d’engrenages, de roues et de cordages. Il fut rejoint par un ingénieur du canal de la division de Béziers qui perfectionna l’engin. Par ailleurs, selon les lieux où le problème était présent et où se trouvait une main-d’œuvre peu couteuse, le travail était demandé à des hommes armés de faux ou de chaînes en fer garnies de pointes en épis.

Le sel du Somail

Jusqu’au début du XXe siècle, on vit, comme sur le fameux canal de l’Ourcq (ouvrage du bassin parisien qui préoccupa bien Riquet, alors qu’il n’eut pas le temps de le réaliser avant la fin de sa vie) des barques à col d’homme avec deux ouvriers à bord détachant les plantes et coupant les herbes au fond de l’eau.

Une anecdote fut également relatée en 1804 par Antoine François Andréossy à propos d’un moyen retardant, pour une longue durée, la prolifération des herbes sur le  grand bief. Il s’agit de la mésaventure d’un bateau chargé de sel qui coula au Somail. Son chargement se retrouvant au fond de l’eau, le sel s’est répandu sur une importante distance et s’est dissout dans l’eau douce. « On a vu des herbes à cet endroit qu’environ vingt ans après ». L’arrière-petit-fils d’Andréossy se contente de citer l’histoire. Il n’écrit pas si l’expérience servit à certains pour être volontairement fut renouvelée. Pour ceux que cela inspirerait, sachez que le sel, ou chlorure de sodium, ne doit pas être considéré comme un désherbant naturel et anodin. Il ne se dégrade pas et ces effets sont nocifs pour le sol dont il modifie la perméabilité, pour les nappes phréatiques et pour les micro-organismes, insectes et biotope en général. Le système racinaire de certains végétaux comme des arbres, même éloignés de l’endroit où ce sel a été utilisé, risquent aussi d’être atteints et mourir.

Aujourd’hui, une approche différente de celle des siècles passés est entreprise par VNF : celle de ne pas systématiquement supprimer des végétaux contribuant à l’équilibre et à la richesse du biotope naturel du site est devenue une priorité. Repérer, répertorier et protéger les essences et espèces utiles tout en maîtrisant les invasives et en intervenant sur les plantes qui risqueraient de dégrader l’ouvrage font partie des actes de gestion. Tout comme la replantation des arbres et la végétalisation des berges, la flore aquatique participe à ce foisonnement de végétaux qui se reflète, sens dessus dans le miroir d’eau et qui, un jour de 1966, donna « le ton » à Nougaro pour chanter « L’eau verte du canal ».

Véronique Herman

Classé sous :Actualités Balisé avec :canal du Midi, chronique au fil de l'eau, Clausade, fauchage, herbes

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