La réouverture des écoles maternelles et élémentaires le 11 mai ne fait pas l'unanimité au sein de l'éducation nationale et des maires de France. Le gouvernement a délégué la responsabilité de la reprise des cours aux élus municipaux locaux tout en leur fournissant, un protocole sanitaire fastidieux à respecter. Reçu une semaine avant la date butoir, nombre de ces recommandations seront bien difficiles à mettre en place dans les délais imposés. Voici quelques exemples qui expliquent pourquoi certaines municipalités ont maintenu la fermeture des classes craignant de ne pouvoir se conformer à des directives compilées dans un document de plus de 50 pages.

Les directives sont axées autour de 5 mesures majeures :

Appliquer les gestes barrières
Maintenir la distanciation sociale
Limiter au maximum le brassage des élèves
Assurer le nettoyage et la désinfection des locaux et matériels
Communiquer et informer

Commençons avec les mesures hygiéniques minimales imposées aux élèves, personnel enseignant et non enseignant.

« Un lavage des mains nécessaire à minima :

• A l’arrivée ;

• Avant de rentrer en classe, notamment après les récréations ;

• Avant et après chaque repas ;

• Avant d’aller aux toilettes et après y être allé (un standard en temps normal NDLR);

• Après s’être mouché, avoir toussé, avoir éternué ;

• Autant que de besoin après avoir manipulé des objets possiblement contaminés ;

• Le soir avant de rentrer chez soi. »

Pour une classe de 15 enfants, cela peut représenter un temps considérable, nécessitant l'attention constante de l'enseignant, qui de surcroit ne doit pas avoir de contact direct avec les enfants et respecter une distance d'au moins un mêtre. On imagine aisément les interuptions constantes de la classe qu'implique la respect de ces directives.

« Les échanges manuels de ballons, jouets, crayons etc. doivent être évités ou accompagnés de modalités de désinfection après chaque utilisation. »

Là encore, la principale difficulté réside dans le contrôle des objets accessibles aux enfants. Pour la maternelle, ces contraintes sont encore plus strictes puisque le personnel enseignant doit « retirer l'ensemble des jeux pouvant être manipulés à plusieurs dans les coins de symbolisation (poupées, dinettes, jeux de construction...). Attribuer par exemple, une couleur par enfant pour les stylos, feutres, ciseaux…ou prévoir des boites individuelles. » Facile donc d'imaginer la difficulté pour trouver ne serait-ce que 15 couleurs différentes pour les objets concernés et relier le tout à chaque enfant, tout en ayant assez d'espaces de stockage pour ranger tous les objets qui doivent être radiés de leur environnement même temporairement ou désinfectés régulièrement dès qu'ils sont utilisés.

En ce qui a trait aux jeux et activités en classe, les enseignants devront « Adapter le fonctionnement des bibliothèques collectives en régulant la manipulation des livres par les élèves (livre individuel laissé au repos 5 jours après utilisation). Privilégier les lectures par l'enseignant pour limiter les manipulations des livres en dotation collective par les enfants. Privilégier les découvertes et la culture au travers des moyens audio visuels (projection des visites de musées virtuels....). Penser à des jeux qui ne requièrent pas de toucher des surfaces communes et ne passent pas entre les mains. Par exemple : jeux de mime, devinettes, etc. » Évidemment, tout cela reste dans le domaine du possible, mais les très courts délais imposés pour faire la recherche nécessaire, préparer les jeux et animations, trier et désinfecter tous les matériels pédagogiques relèvent plus d'un sprint marathon favorisant des oublis ou des maladresses. Exiger un tel degrés de préparation pour certains établissements de villages disposant de moins de moyens et de personnel que ceux présents dans de grandes agglomérations peut-être un défi.

Au niveau des locaux « L’aération est un geste qui doit maintenant être systématique et durer au moins 10 minutes à chaque fois. Les salles de classe et autres locaux occupés pendant la journée doivent être aérés le matin avant l’arrivée des élèves, pendant chaque récréation, au moment du déjeuner et le soir pendant le nettoyage des locaux. » Heureusement, les beaux jours arrivent et les températures permettront d'aérer convenablement les locaux. Cependant, si dans certains établissements la mise en place de récréations alternées n'est pas possible et que le vent est fort, respecter de telles consignes sera complexe en laissant les enfants en pause dans les classes, l'air ne faisant que brasser l'air intérieur rendant inutile toute distanciation d'un mêtre ou plus.

Enfin, les parents auront aussi un rôle prépondérant à jouer dans ce processus scolaire inédit puisque «  Ils s’engagent, notamment, à ne pas mettre leurs enfants à l’école en cas d’appariton de symptômes évoquant un Covid-19 chez l’élève ou dans la famille de l’élève. Les parents sont notamment invités à prendre la température de leur enfant avant le départ pour l’école. En cas de symptômes ou de fièvre (37,8°C), l’enfant ne devra pas se rendre à l’école. » Prendre la température de ses enfants tous les matins avant le départ à l'école peut s'avérer compliqué quand on a une famille nombreuse et la détection de la maladie chez les enfants est plutôt douteuse car la plupart son asymptomatiques! Il leur est aussi demandé de privilégier des habits de sports faciles à manipuler pour que l'enseignant n'ai pas à intervenir. Pour les maternelles cela relève du domaine de l'impossible et les « accidents » d'hygiène risquent de compliquer les choses.

Évidemment, impossible de lister ici toutes les directives communiquées par le ministère de l'Éducation nationale puisque le document s'étire sur plus de 50 pages, mais il est aisé de comprendre au regard de ces quelques exemples que leur mise en place est un défi titanesque pour une execution qui ne pourra être qu'approximative. Cette mise en place aurait grandement bénéficié de plus de temps, tel que l'on demandé bon nombre de maires et d'enseignants. Avec un retour en classe le 12 mai, il ne restera que 37 jours de cours pour cette année scolaire. Alors, tout ça pour ça ?

T.G