Réalisation : Constance Meyer
Durée : 1 h35
Avec : Gérard Depardieu, Déborah Lukumuena, Lucas Mortier
Lorsque son bras droit doit s’absenter, Georges, star de cinéma vieillissante, se voit attribuer une remplaçante, Aissa. Les films où Gérard Depardieu s’amuse à jouer avec sa propre image sont en passe de devenir un genre en soi. Ici, la réalisatrice lui accole Déborah Lukumuena qui incarne Aïssa, le nouveau garde du corps de la star solitaire et capricieuse. Constance Meyer explore la confrontation entre deux solitudes. Bon, l’acteur on a l’impression de déjà bien le connaître même s’il est amené là dans des zones de vulnérabilité et d’intimité. Mais on a le sentiment de découvrir Déborah, qui est plus “neuve” donc plus mystérieuse. Georges et Aïssa, entre puissance et souplesse, pourrait-on dire. Tout les oppose, à une exception près. Le point commun entre ces deux personnages et acteurs, c’est leur corpulence, indiquée dès le titre. Le spectateur assiste à une rencontre entre deux êtres, deux corps en mal d’amour, et va s’attacher autant à Aïssa qu’à Georges car un équilibre existe entre les deux personnages. Ce sont des corps hors normes que la caméra met à nu. Vous l’avez compris, Robuste ne se réduit pas à un documentaire sur l’acteur. Il faut donc le transformer en lui donnant un partenaire à sa mesure, mais avec qui le faire jouer alors qu’il sort sans cesse du cadre ? La cinéaste l’a donc associé à un autre corps robuste et fragile comme le sien, mais féminin, bien plus jeune et qui possède d’autres codes sociaux : celui de l’agente de sécurité qui le protège. Ces deux individus que tout semble opposer vont alors être amenés à partager un quotidien. Sans trop de mots, ils vont se reconnaître, apprendre à se découvrir, à se regarder. Intrigués, ils se tournent autour, s’observent, se sentent. La réalisatrice capte avec délicatesse la dimension animale de cette rencontre et l’attachement progressif de ces êtres. Construit en miroir, le film s’immisce dans l’univers intime de chacun des protagonistes. Georges, désabusé, vit tel un enfant gâté. Aïssa, tout aussi tourmentée, peine à s’abandonner dans les bras de celui qu’elle aime. Deux êtres se découvrent et s’élèvent. C’est beau, sobre et nécessaire. Le grain de la photographie accentue la beauté de l’image. Les plans rapprochés sur les corps confèrent une véritable sensualité à ce film singulier.
Jean Segonne