La Semaine du Minervois

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Chronique au fil de l’eau : du roi Soleil aux paysans et simples gueux sous la protection de saintes icônes

5 mai 2021 By Redaction

Au creux des élégants méandres du canal du Languedoc, au fil des temps tumultueux, des plus humbles aux plus grands, démunis face à l’adversité, ils ont confié tous leurs espoirs aux mystères de ces icônes sacrées et posé leurs pas sur ces chemins de ferveur et de dévotion… Poursuivons ainsi avec eux ce voyage au cœur de cette âme humaine désemparée. Reprenons le cours de notre petite rubrique laissée, la semaine dernière, à Toulouse le 18 août 1672, en « présence » de Notre Dame de la Daurade au cœur de sa cité en feu, intercesseuse de cette terre occitane auprès de la miséricorde céleste et qui nous trace la voie vers ces fameuses figures sacrées à l’étrange noirceur.

Notre Dame du Cros à Caunes Minervois dans son écrin de marbre, une vierge noire également auréolée de légendes et d'histoires où se mêlent la présence d'une source miraculeuse, de disparitions et de réapparitions, et d'une chapelle qui n'aurait pu être construite qu'après avoir choisi l'emplacement au hasard d'un lancé de marteau. Photo ©Fred Seiller

D’une source au sanctuaire marial

Revenons en deux mots sur cette statue miraculeuse de pur style roman que, en 1212, deux prieurs se chamaillant font disparaître pour plus de trente ans. Elle sera retrouvée en Catalogne sous le nom de la Mare de Deu del Claustre à Solsona dont les traits, nés des mains du Maître toulousain Gilabertus, ressemblent singulièrement à ceux de la Vierge Noire de Montserrat, tant vénérée par le peuple catalan. Mais au bord de la Garonne, elle manque. Son peuple et ses capitouls se languissent de leur petite dame en majesté qui, nichée dans son église aux éclatantes mosaïques dorées (Deaurata), «officie» pour eux depuis… près de neuf siècles! Sa naissance lui est en effet reconnue vers 350 dans un temple romain, là où un siècle plus tard s’édifiera un sanctuaire marial et dont l’emplacement originel était celui d’une source.

Sur le bûcher de la Révolution

A la fin du XIIIe siècle, Raynaldus, un talentueux sculpteur d’Auch, l’a fait enfin réapparaître, sereine et grave, à peine différente, dans sa silhouette assise, tout de bois sculptée. Dès 1324, elle reçoit les honneurs de l’Académie des Jeux Floraux et chaque année, le 3 mai, elle séduit les meilleurs troubadours, ceux qui, lors des joutes poétiques du Verger des Augustines, vont l’honorer en canso et sirventès. Avec les siècles, elle deviendra Notre Dame la brune puis Notre Dame la noire, celle dont, en 1672, les capitouls demanderont la « descente » en procession pour sauver la cité des flammes. Vénérée jusqu’à la Révolution, elle fut brûlée au Vendredi saint de l’an 1794, sous les huées et les insultes… à l’instar de sa « grande sœur » du Puy-en-Velay qui, le 8 juin de la même année, périt dans les flammes sous les cris d’une foule vociférant « A mort l’Egyptienne ». Comme en Auvergne, le culte et les dévotions reprirent à Toulouse avec une nouvelle statue au début du XIXe

Notre Dame de Marceille à Limoux : dans sa basilique de style gothique méridional, la vierge noire de Marceille vécu également des aventures qui la firent disparaître puis réapparaître. A l'instar des nombreuses vierges noires, son sanctuaire a été élevé près d'une source réputée "miraculeuse"

Ces Dames noires aux destins croisés

Retracer l’histoire de cette Notre Dame de La Dorade c’est quasiment poser un calque sur celle de chacune de ces énigmatiques figurines aux traits sombres et avancer ses pas dans les empreintes laissées par de sécrètes Vierges noires. La France entière en dénombre environ deux cents exemplaires, la majorité d’entre-elles ayant choisi d’habiter l’Auvergne, rude pays né du ventre de la terre où la fertilité et l’espoir de tous les possibles sont les biens les plus précieux. Pourtant elles n’ont pas totalement oublié notre pays audois qui, lui aussi, l’implore de ses souhaits pour un avenir, fertile et généreux. Notre département en compte donc quelques-unes comme celle de la basilique de Marceille à Limoux ou du sanctuaire de Notre Dame du Cros à Caunes-Minervois. Différentes, à peine parfois, dispersées toujours, sur les chemins de leur histoire elles se croisent en bien des chapitres communs : souveraine déesse, « déesse mère », archaïque et primordiale, elle est la protectrice universelle qui a traversé les âges, celle des chasseurs de l’âge de pierre, des semeurs de grains et des guerriers, celle des autres mères, promesses de descendances.

A début du culte marial

Dans le monde chrétien, les traditions liées à la Vierge ne semblent apparaître en Occident que vers le Ve siècle, tandis que dans le rayonnement de Byzance (Constantinople) l’Empire romain d’Orient a déjà dressé ses temples consacrés à Marie. Magna Mater, on l’y voit portant un enfant, couronnée telle Cybèle et assise comme Isis l’égyptienne. Sa poitrine est généralement cachée par une gorgone à la façon d’Athéna. L’Eglise de Rome adoptera officiellement le dogme de l’Incarnation par le concile d’Ephèse qui la déclare « Mère de Dieu » en 431. L’évolution européenne vers un véritable culte marial viendra bien plus tard, au XIIe siècle, en plein essor de l’art roman, avec saint Bernard, le célèbre Bernard de Clairvaux. Installée sur un trône ou debout en majesté, la sainte égérie est déposée sur les autels de pierre, édifices naturels ou érigés par l’homme. Modeste ou gigantesque, elle est devenue Notre-Dame de toutes les adorations, la figure de proue du grand vaisseau de la chrétienté qui vogue alors allègrement sur tout l’Occident.

« Nigra sum, sed formosa »

Au XVIIe siècle, les Jésuites diffusent ce passage du Cantique des cantiques « Noire moi et jolie » traduction littérale en hébreu de paroles qui en français seront « je suis noire mais belle ». L’apparition de la couleur d’ébène sur ces statues romanes reste parée de tous les mystères et suscite toujours bien des hypothèses: si pour certains ce furent la fumée des cierges et l’oxydation des couleurs qui, au cours du temps, les voilèrent de sombre ; pour la majorité, il s’agit d’un acte bien volontaire qui eut lieu de la fin du Moyen Age jusqu’au XIXe siècle. Au départ cette démarche semble liée à l’échec de la dernière croisade et à la désillusion qui entraîna la défection des pèlerinages. L’Eglise, désirant recentrer ses fidèles sur une icône phare, raviva les dévotions sur les pouvoirs miraculeux de cette mère suprême, capable de convertir les plus mécréants, de triompher des ténèbres et de sauver le peuple du grand fléau qu’était la peste « noire », terrible châtiment divin.

Le christianisme a ainsi marché dans les traces laissées dans la nuit des temps par un Homme « religieux », en communion avec la nature et les éléments qui, pourtant, l’ont toujours effrayé, au plus profond de son âme, par leurs mystères et leur sauvagerie indomptable. L’Église a donc élevé ici comme ailleurs, sa Vierge, mère de Dieu, sur les bases dites « païennes » de notre humanité, exprimant toute la dualité de cette muse du sacré, pauvre paysanne ou Majesté couverte d’or et de pierres précieuses.

Véronique Herman

Certificat de pèlerinage à Notre-Dame de Liesse délivré en 1742 (archives de l’Aisne)

Le roi Soleil lui-même encouragea un réel engouement pour les pèlerinages à la Vierge noire, dont celui de Notre-dame de Liesse dans l’Aisne. Les prières des pèlerins demandaient son intercession pour la guérison de maladies incurables, contre les épidémies dont la peste, la protection des femmes en couches ou pour éviter catastrophes naturelles et les épidémies. Comme dans les autres villes, ces rassemblements dévots représentent une vraie valeur économique puisque des hostelleries sont ouvertes mais aussi de nombreux ateliers d’artisans, dont des orfèvres fabriquant et faisant négoce de croix, médailles et anneaux. Dans certains lieux où le peuple peut honorer la Vierge là où se trouve une source (ce qui est souvent le cas) des bouteilles dites « de la passion » sont vendues. Comme dans la majorité des cas, ce sera la révolution qui marquera la fin de ces manifestations.

Classé sous :Actualités Balisé avec :culte marial, dames noires, révolution, roi soleil, vierge noire

Chronique au fil de l’eau : dans la brume inquiétante des calamités, sortent les déesses-mères, virginales et ténébreuses

28 avril 2021 By Redaction

Gel, grêle, sécheresse, inondation, épidémie ou incendie… tant de maux pour une humanité bien démunie et impuissante. C’est ainsi que, depuis la nuit des temps, l’Homme accablé a voulu conjurer ses malheurs en implorant les dieux. Et bien souvent, il choisit l’icône suprême de la mère universelle, investie du pouvoir des déesses fécondes et protectrices, pour jeter son dévolu, fondant en elle tous ses espoirs. Et du pays toulousain aux terres minervoises, au travers des siècles il l’implora.

avec le développement des réseaux autoroutiers des soixante il est envisager de détruire l'ensemble du site près de la Garonne. Il est même question de concevoir une autoroute dans le lit du canal du Midi! mais les responsables des Monuments historiques tinrent bon

Comme emportés par une barque descendant de Toulouse vers Sète, nous allons consacrer nos prochaines chroniques à ce même sujet pour qu’ensemble nous partions à la rencontre de quelques-uns de ces événements qui marquèrent nos bonnes gens et qui les poussèrent, désemparés, à s’en remettre aux miracles et aux dévotions.

Dans la touffeur de l’été.

18 août 1672. Toulouse se réveille les yeux cernés et la bouche sèche après une mauvaise nuit dans la touffeur de cet été torride. Faubourg Saint-Michel, la poussière se soulève au passage de chaque chariot, se déposant sur les échoppes, souillant souliers, chausses et même pourpoints. L’eau, que les habitants ont obligation de jeter quotidiennement sur les déchets, sèche si vite qu’elle ne les fait plus glisser sur le pavé pour atteindre la rigole du milieu de la chaussée. Les détritus se couvrent de mouches et se décomposent sur place. Ça fleure le crottin et les ordures sans parler de cette pestilence acre qui se dégage des ruelles aux « petits coins » choisis par ceux qui ont coutume d’aller s’y soulager. Cela dit, gare à celui qui se déculotte à la vue de tous car il risque une amende de 5 sols. Chacun frôle les habitations, cherchant à tout prix les lignes d’ombre pour se déplacer. Même les premiers barquiers que l’on peut voir sur ce fameux canal royal du Languedoc suent autant que leurs chevaux sur le chemin de halage. Depuis le mois de janvier de cette année, les barques de voitures chargées de vin et de blé peuvent atteindre Naurouze. Puis, au nord après la porte de Bazacle, la première écluse de l’ouvrage de Monsieur Riquet, celle de descente de Garonne, permet de faire commerce avec les Gascons, grâce à cette liaison entre fleuve et canal.

Cette affichette était un "placard" qui fut imprimé en 1715 comme "mandement des vicaires généraux, octave (soit durant 8 jours) et procession de la vierge de la Daurade contre la sécheresse . Archives municipales de Toulouse, AA 303/27.

Nuit rouge sur la ville rose

C’est donc dans le quartier Saint-Michel étouffant déjà sous une chaleur caniculaire que ce jour d’août 1672 se déclare un terrible incendie. Attisées par le souffle déchaîné du vent, les flammes mordent chaque pan de bois des maisons du faubourg et progresse vite. Trop vite. La population s’affole. La mémoire douloureuse de la ville se réveille. Cela fait à peine un an que le feu l’a déjà meurtrie puis de génération en génération s’est transmise la peur qu’éprouvèrent leurs ancêtres lors d’un précédent désastre, celui subi en 1463. Il brûla alors durant douze jours, lui aussi propagé par le vent d’Autan, son funeste complice dans la destruction de plusieurs milliers de maisons. Depuis, la cité s’est lentement reconstruite, privilégiant la brique de terre cuite (argile de la terre toulousaine) sur l’ordre des capitouls. Mais, 190 ans plus tard, plus d’un tiers des façades sont toujours en torchis et en bois, des matériaux qui flambent comme des torches. L’ardeur du brasier devient vite insoutenable, l’incendie a sauté par-dessus les fossés d’enceinte et menace les portes de la ville. Si au moins ce vent se calmait ou apportait la pluie. Il faudrait un prodige pour arrêter ce désastre.

Miraculeuse Notre-Dame noire

Huile sur toile du peintre Jean Danye - 1676 représentant la scène de la procession de 1672. Elle est présente dans la nef de la basilique de la Daurade 

La seule qui, aux yeux de nos Toulousains, serait capable d’intercéder en leur faveur pour les sauver n’est autre que Notre-Dame de la Daurade, cette petite vierge noire mystérieuse qu’ils vénèrent ardemment depuis des siècles. Dans le secret de son sanctuaire, qui deviendra basilique, elle a déjà exaucé tant de femmes en mal d’enfant. Puis maintes et maintes fois, lors de grands dangers, ils l’ont priée, les capitouls demandant aux religieux de la sortir de son sanctuaire et de la porter en lente procession dans la rue. Et bien souvent le miracle se produisit ! En 1212, la «Chanson de la Croisade», celle contre les Cathares, n’en est-elle pas la preuve ? Les troubadours ne racontent-ils pas que, durant le siège de la Toulouse par Simon de Montfort, le peuple, les bourgeois et les nobles l’implorèrent si ardemment qu’une crue violente endommagea le pont de la Daurade, poussant les envahisseurs à battre en retraite? N’est-ce pas elle, encore, qui intercéda pour calmer le gel destructeur des futures récoltes, pour abreuver la terre d’une bonne pluie lors de terribles sécheresses et inversement pour apaiser le déluge et cette impétueuse Garonne menaçant d’inondation ou encore pour que s’arrêtent, en 1653, ces sursauts d’épidémie de peste qui, depuis 1348 et par vingt fois, terrassèrent Toulouse ? Alors oui en cette funeste journée d’août 1672, les capitouls vont faire vœu à Dieu par son entremise, demandant sa «descente», c’est-à-dire sa procession dans la cité. Et cette fois encore accompagnée d’une foule à l’intense ferveur religieuse ainsi renouvelée, prête, comme à chaque fois, à multiplier les offrandes et à sacrifier au rituel en toute crédulité, elle va entendre les prières. Le vent se calma, le feu s’apaisa et il ne fallut pas beaucoup de temps pour que la pluie se mette à tomber. Deux cents maisons furent malgré tout détruites mais la ville fut épargnée. On peut aisément imaginer, comme le fait remarquer Mireille Oblin-Brière dans son livre « Riquet le génie des eaux », que notre baron de Bonrepos et sa famille, dont la maison toulousaine se situait non loin du quartier de la Daurade, à la rue Puits-Clos, vécurent eux aussi ces événements de près.

Véronique Herman

Classé sous :Actualités Balisé avec :canal du Midi, chronique au fil de l'eau, dame noire, vierge noire

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